Quelle indemnisation pour le conducteur responsable d’un accident ?
L’indemnisation des préjudices des victimes d’accident de la circulation est régie par la Loi Badinter. Cette loi pose une distinction entre les conducteurs victimes d’un accident causé par un tiers et les victimes non-conductrices telles que les piétons et les cyclistes.
Ainsi, l’article 3 de cette loi dispose que : « Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident. »
Le conducteur qui commet une faute dans la réalisation de l’accident peut voir son droit à indemnisation impacté en raison de la gravité de la faute commise.
A ce titre, l’article 4 de la loi prévoit que : « La faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d’exclure l’indemnisation des dommages qu’il a subis. »
Cas concret : Analyse de responsabilités
Prenons le cas d’un conducteur de scooter qui opère un dépassement en franchissant une ligne continue, et en ne respectant pas la limitation de vitesse.
Dans sa progression, il croise la route d’un automobiliste qui sort d’un parking et à qui d’autres usagers cèdent le passage pour lui permettre de s’insérer dans la file de circulation. Un choc survient entre les deux véhicules.
Les deux conducteurs ont commis une faute, le scooter pour avoir opérer un dépassement en franchissant une ligne continue et en ne maitrisant pas sa vitesse et l’automobiliste pour ne pas avoir respecté l’obligation de céder le passage dont il était débiteur.
Si à la lecture de tels faits on pourrait penser que seul l’automobiliste est responsable, les juges ont une tout autre interprétation de ces situations. Bien souvent, les décisions judiciaires retiennent à l’encontre du scooter une part de responsabilité dont le taux est proportionnel à la faute commise et sa fixation relève de l’appréciation souveraine des juges.
Dans ce cas, le conducteur du scooter victime n’aura plus droit à une indemnisation intégrale de ses préjudices par l’assurance du véhicule tiers, mais son indemnisation sera proportionnée au taux de responsabilité retenu par les juges. Cependant, le conducteur victime et fautif peut cumuler l’indemnisation versée par l’assureur du véhicule tiers avec l’indemnisation à laquelle il pourrait prétendre au titre de la garantie du conducteur de son propre contrat d’assurance.
Rôle de la “Garantie du conducteur” dans l’assurance
L’article L.211-1 du Code des assurances dispose que :
« Toute personne physique ou toute personne morale autre que l’État, dont la responsabilité civile peut être engagée en raison de dommages subis par des tiers résultant d’atteintes aux personnes ou aux biens dans la réalisation desquels un véhicule est impliqué, doit, pour faire circuler celui-ci, être couverte par une assurance garantissant cette responsabilité, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État… »
En effet, la disparité de traitement entre les conducteurs et les non-conducteurs (piétons, cyclistes) a conduit les assureurs à promouvoir au bénéfice des conducteurs des garanties spécifiques permettant l’indemnisation des conducteurs victimes d’accident lorsque l’accident ne met en cause la responsabilité d’aucune autre personne par exemple.
Cette garantie est matérialisée par la présence dans les contrats d’assurance d’une garantie dite « Garantie du conducteur » dont le rôle est de réparer le préjudice du conducteur victime lorsque seul son véhicule est en cause et/ou qu’il est responsable de l’accident.
Droit à l’indemnisation du conducteur victime
Selon la Cour de cassation (Chambre civile 2, 16 juillet 2020, 18-24.013 19-16.696), en cas de limitation du droit à indemnisation d’une victime d’accident de la circulation, cette dernière est en droit de bénéficier de son assureur, des garanties souscrites au titre de la « Garantie du conducteur ».
« Vu les articles 1134, devenu 1103, et 1382, devenu 1240, du code civil, L. 131-1 et L. 131-2, alinéa 2, du code des assurances et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :
La limitation, en raison de sa faute, du droit à indemnisation du conducteur victime d’un accident de la circulation est, sauf stipulation contraire du contrat d’assurance garantissant l’indemnisation des préjudices résultant d’une atteinte à sa personne, sans effet sur le montant des prestations à caractère indemnitaire dues par son assureur au titre de cette garantie. Il en résulte que ce conducteur victime peut, dans la limite du montant de ses préjudices, percevoir en sus de l’indemnité partielle due par le responsable de l’accident les prestations à caractère indemnitaire versées au titre de son assurance de personne. »
Une telle disposition reste encore méconnue de la plupart des conducteurs. En cas de réduction de son droit à indemnisation, le conducteur doit donc vérifier s’il dispose dans son contrat d’assurance d’une garantie du conducteur et il doit inviter son assureur à réparer son préjudice conformément aux garanties de son contrat.
Bien entendu, l’indemnisation se fera dans la limite des conclusions de l’expertise médicale et il est conseillé lorsque le dossier est géré à l’amiable de demander la mise en place d’une expertise commune aux deux assurances et en cas de procédure judiciaire de mettre en cause pareillement les deux assureurs afin que le rapport d’expertise leur soit opposable.
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