Médecin expert : son rôle en cas d’accident ?

En matière d’expertise médicale, plusieurs types de médecins ont vocation à intervenir. Si tous pratiquent l’évaluation du dommage corporel, chacun d’eux dispose d’un rôle précis et distinct des autres.

Bien comprendre l’identité et le rôle de chacun est particulièrement nécessaire afin d’éviter toute confusion dans l’esprit des victimes, lesquelles sont bien trop souvent induites en erreur par le terme générique très usité de médecin expert, emprunté à tort par les compagnies d’assurances pour désigner celui qui incarnera en réalité leur médecin conseil.

Le médecin conseil d’assurances

Il s’agit de l’assistant technique de l’assurance qui couvre le responsable d’un accident. Ce médecin est dans ce cas précis mandaté, missionné et formé par une société d’assurance.
Il est ainsi rémunéré par le régleur exclusivement, et a donc pour seul objectif de défendre les seuls intérêts de ce dernier, et non ceux de la victime.

Le médecin expert

Ce médecin est spécialement désigné par un magistrat pour examiner la victime, évaluer les blessures subies et déterminer les conséquences médico-légales de l’accident. Ces informations permettront ainsi de fournir au juge tous les éléments nécessaires à l’indemnisation de la victime.

Contrairement au médecin conseil d’assurances, sa rémunération provient directement du demandeur à l’action (c’est-à-dire la victime le plus souvent, parfois l’assureur) dans le cadre d’une procédure en référé (lorsqu’il existe des raisons sérieuses et plausibles de penser que le droit à indemnisation ne posera aucune difficulté) ou au fond (c’est-à-dire une fois le droit à indemnisation démontrée). Cette rémunération s’opèrera par le biais d’une consignation auprès de la régie du Tribunal.

L’expertise médicale aura ainsi pour unique objet de déterminer chez la victime les séquelles imputables au fait générateur de dommage corporel qu’elle allègue. Il s’agira donc de réaliser son évaluation médico-légale. Celle-ci sera nécessaire d’une part à l’établissement des conséquences corporelles du dommage et d’autre part, à celui du lien de causalité entre le fait générateur et le dommage subi.

La mission de l’expert s’exerce généralement de la manière suivante : l’expert devra veiller à bien prendre connaissance en amont de tous les documents médicaux et administratifs. Ces derniers lui lui seront communiqués par les parties, puis il entendra la victime qui lui exposera ses doléances et l’examinera. Viendra ensuite un premier temps d’échange entre les parties et leurs conseils, avant un second temps où la victime sera invitée à quitter le cabinet de l’expert afin de laisser place à des discussions plus techniques entre les divers intervenants.

Un rapport d’expertise médicale circonstancié sera enfin ultérieurement rédigé. Ce rapport répondra à la fois à toutes les questions posées par le juge mais aussi aux observations écrites des parties, formulées en amont de la rédaction du rapport par le biais de « dires à expert ».

Recensé sur une liste d’une Cour d’appel et exerçant son office exclusivement dans son domaine précis de compétence, le médecin expert pourra toutefois s’adjoindre tout sapiteur de son choix, c’est-à-dire un autre confrère spécialisé dans un domaine annexe, lorsqu’il s’agit de répondre à des interrogations qui ne relèvent pas de son champ de compétence.

Le rapport d’expertise déposé ne visera cependant qu’à éclairer le juge quant au droit et à l’étendue du droit à indemnisation de la victime, lequel conservera toujours son pouvoir d’appréciation souverain. Aussi, les parties pourront toujours si elles le souhaitent demander au juge que soit ordonnée une contre-expertise.

Il est par ailleurs important de rappeler que n’est véritablement médecin expert que le seul médecin désigné par le juge, à l’exclusion du médecin conseil d’assurances.

Le médecin conseil de blessé

Le médecin conseil de blessé est l’appellation utilisée pour désigner le conseil technique qui défend les intérêts de la victime lors de l’expertise médicale. Egalement appelé médecin de recours, il a choisi de ne travailler exclusivement qu’au service des victimes. Ce choix est notamment gage d’indépendance et d’éthique. Si ce type de médecin dispose initialement de la même formation médico-légale que ses homologues précédemment mentionnés, le cœur de sa mission s’en détache en tous points.

En effet, le médecin conseil de blessé a une double mission : celle d’assurer la défense de la victime au plan médico-légal, et de veiller à ce que l’évaluation des différents postes de préjudices par le médecin expert ou le médecin conseil d’assurances soit bien conforme à la réalité des préjudices subis.

Son champ d’intervention s’étend donc avant, pendant et après l’expertise :

• Avant l’expertise où il dispose d’un rôle de préparation de la victime et de son dossier : constitution du dossier médical et du dossier administratif, recueil des doléances et des antécédents de la victime, évaluation médico-légale des préjudices subis et enfin explication du déroulement des opérations expertales à intervenir et mise en place d’une stratégie avec le conseil de la victime.
• Pendant l’expertise où il assiste la victime en participant à l’examen clinique de la victime et à la discussion médico-légale avec le médecin conseil d’assurances ou le médecin expert.
• Après l’expertise où il explique à la victime les conclusions retenues par le médecin conseil d’assurances ou le médecin expert, et envisage avec elle en cas de désaccord avec ces conclusions, la rédaction d’un rapport circonstancié afin de solliciter une contre-expertise médicale ou de dires à expert dans le cadre d’une expertise judiciaire.

Rémunéré par la victime, son rôle est de défendre les intérêts du blessé conjointement avec l’avocat ou le conseil choisi par ce dernier.